Le déclenchement de la révolution belge, nous l’avons vu, se situe en 1830. Toutefois, les événements débordent du cadre de cette année et se poursuivent en 1831 et même après, ce qui sera traité à part.
La conférence de Londres
L’histoire n’est pas écrite d’avance et si l’on se replace dans le contexte de l’époque, deux possibilités sont offertes aux puissances: intervenir militairement pour rétablir le statu quo ante ou négocier. C’est la seconde opinion qui prévaut finalement, avec le déclenchement de la conférence de Londres le 4 novembre 1830. En fait, les puissances doivent composer avec les événements qui se sont déroulés depuis l’été.
Ainsi, il paraît impossible de ne pas tenir compte des indépendantistes belges et de leurs succès. Les dirigeants ont aussi en tête les trois glorieuses qui ont chassé Charles X et d’autres soulèvements contemporains, notamment en Italie et en Pologne. La crainte d’une intervention précipitée qui déclencherait d’autres révoltes voire déboucherait sur une guerre généralisée est donc réelle et milite également en faveur de la négociation. Les signataires de l’acte final du congrès de Vienne souhaitent globalement préserver cet édifice (la France, moins) et encadrer la révolution belge plutôt que de la voir devenir incontrôlable.
En fait, comme dans beaucoup d’autres grandes conférences de paix, le sort de la Belgique, qui la regarde au premier chef, ainsi que les Pays-bas, est décidé par d’autres États. Guillaume espère évidemment recouvrer sa souveraineté pleine et entière sur ses provinces rebelles, mais il n’est pas en mesure de l’imposer aux autres et la situation lui échappe rapidement. De plus, le Comité belge ne manque pas de finesse, se présentant comme modéré, sachant très bien que ses moyens sont très limités. Cette stratégie paie, globalement, d’autant que la France et le Royaume-Uni poussent vers l’indépendance.

Daumier caricature en 1832 la conférence de Londres. Attachés à un poteau, Pays-Bas et Belgique ne peuvent décider de leur sort, qui se joue pendant que la Pologne est écrasée par le tsar. Photo libre de droits hébergée sur Wikipédia, [en ligne], https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/80/Daumier_-_Conference_de_Londres.png, (page consultée le 27 juin 2020, dernière modification inconnue).
Les puissances se rallient à l’indépendance
J’ai rappelé dès le début que Paris souhaitait la fin du Royaume-Uni des Pays-Bas, et il faut ajouter que si ce n’est pas le cas de Londres, le gouvernement britannique préfère encore une Belgique indépendante et protégée que voir Louis-Philippe s’emparer de territoires qu’elle juge vitaux pour ses intérêts, entre autres raisons. C’est donc vers l’indépendance et ses modalités que vont s’orienter les débats. Les autres puissances se rallient peu à peu à la position franco-britannique, non sans réticences. En effet, Prusse, Russie et Autriche n’ont guère intérêt à favoriser la naissance d’un nouvel État, surtout pour les deux dernières, empires multiethniques où la situation serait vue comme un dangereux précédent, surtout à l’heure où l’Italie autrichienne bouillonne et où la Pologne russe est en pleine rébellion.
Paradoxalement, c’est pourtant cet état de fait qui les décide peu à peu: ces révoltes mobilisent les armées du tsar et de l’Empereur, les empêchant de se trouver disponibles pour une autre intervention, qui plus est dans une région éloignée de leurs bases. « Lâché » par Vienne et Saint-Pétersbourg, le roi de Prusse ne peut agir seul. Les trois puissances, également désireuses de limiter l’expansion française, approuvent donc le plan présenté. Mieux vaut une Belgique modérée et encadrée que voir la France s’emparer d’Anvers pour elles. Pour le moment, dès le 10 novembre 1830, une trêve est déclarée en Belgique, en attendant la suite des négociations.
Bibliographie consultée (sans but d’exhaustivité):
La référence synthétique la plus scientifique et récente est l’indispensable Nouvelle histoire de Belgique. On pourra aussi se référer à l’étude du professeur Romain Yakemtchouk, qui analyse les choses sous l’angle franco-belge.
-WITTE (Els), Nouvelle histoire de Belgique. 1828-1847. La construction de la Belgique, Bruxelles, Le cri, 2017, 235 p.
-YAKEMTCHOUK (Romain), La Belgique et la France. Amitiés et rivalités, Paris, L’Harmattan, 2010, 297 p.