Archives de Tag: Guerres indiennes

La guerre de Pontiac: III) Vers la fin du conflit

Combats indécis

Je le disais en conclusion la fois précédente : la guerre tourne vite à l’impasse. Le territoire considéré est immense, encore mal maîtrisé par les Britanniques. Ces derniers doivent reconfigurer leur dispositif et envoyer leurs troupes loin de leurs bases, à une époque où les communications ne sont pas les mêmes qu’aujourd’hui. De leur côté, les Indiens manquent de moyens et ne parviennent pas à entraîner les Français, fraîchement défaits par le traité de Paris, dans la guerre. Pour autant, les combats se poursuivent.

Ainsi, au cours de l’année 1765, les « tuniques rouges » s’efforcent de déployer des troupes depuis la Louisiane, afin qu’elles remontent vers le Nord, et montrent une présence effective sur les terres qui s’étendent entre celle-ci et le Canada. Rappelons encore une fois que la Louisiane française est bien plus grande que l’Etat du même nom actuel. Or, cette opération est en partie un succès, car les forces royales parviennent notamment à s’emparer de l’important fort de Chartres, en février de cette année… Avant de subir un revers en avril, où Pontiac les presse durement et parvient même à faire fuir le lieutenant Fraser et ses troupes, venues de Pittsburgh.

Le fort de Chartres, qui a été réutilisé par les Britanniques. Photo trouvée sur: http://www.ameriquefrancaise.org/media-6930/fort_chartres_1.jpg

La guerre cesse

En fait, aucun camp ne parvient à réellement s’imposer et l’emporter sur son adversaire. Les Indiens espèrent encore que la France retrouve sa place dans la région, et vienne à leur secours : je vous renvoie au premier article pour ce qui est de la complexe relation franco-indienne. Ce n’est pas du tout le plan des autorités françaises, durement frappées par la guerre de Sept ans et liées par le traité de Paris. Plusieurs appels sont ainsi repoussés sur place, non sans émotion comme on l’a vu précédemment.

Ainsi, la lassitude finit par gagner les tribus indiennes, qui ne voient plus de produits européens leur parvenir à cause de l’état de guerre, et ont le sentiment de lutter seules, sans plus trop savoir pourquoi. Voilà pourquoi les britanniques acceptent de mener une série de pourparlers, pour sortir d’une lutte peu claire et indécise. Ceux-ci ont lieu fin août-début septembre 1765 et parviennent à une fin de la « guerre de Pontiac », débutée deux ans plus tôt.

On en verra les conséquences dans un dernier article, plus importantes qu’on ne le pense.

Bibliographie sélective (sans but d’exhaustivité):

-DZIEMBOWSKI (Edmond), La guerre de Sept Ans. 1756-1763, Paris, Perrin, coll. « Pour l’histoire », 2015, 670 p.

-HAVARD (Gilles) et VIDAL (Cécile), Histoire de l’Amérique française, Paris, Flammarion, coll. « Champs histoire », 2014, 863 p.

Le site du fort de Chartres, avec de nombreuses photos:

http://www.fortdechartres.us/

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Custer à l’écran: « They died with their boots on » (2/3)

Je vais à présent souligner de nombreux points qui méritent de l’être, car ils montrent un vrai travail de recherche de l’équipe du film, ainsi que certaines prises de position finalement moins tranchées que d’autres réalisations plus contemporaines ou ultérieures. Vu l’ampleur de ce qu’il y avait à dire, le dossier va être découpé en trois, et non en deux.

West Point.

Tout d’abord They died with their boots on présente plutôt bien la société militaire de l’époque, où les soldats et surtout les officiers de métier, comme en Europe, se tiennent en grande partie hors des clivages civils et politiques de leur temps, voire les dédaignent. Sans parler d’Etat dans l’Etat, la société militaire a ses propres règles et n’est pas forcément des plus ouvertes. Ainsi, au début de la guerre de Sécession, on voit le commandant de l’école de West Point laisser partir les élèves officiers originaires du sud, au son de Dixie, chanson caractéristique de cette partie des Etats-Unis, avec un commentaire acerbe pour le représentant du gouvernement, affirmant que ce ne sont pas les militaires qui déclarent les guerres.

Si c’est évidemment à nuancer, et qu’un homme comme Lee a préféré décliner la proposition de commander l’armée de l’Union pour servir le Sud, c’est néanmoins assez fidèle à l’esprit du temps. D’ailleurs, une bonne partie des officiers étaient justement originaires du Sud et Lee que j’ai déjà cité a commandé l’académie quelques années. Notons tout de même que beaucoup d’officiers  tentèrent parallèlement, ou après leur temps de service, une carrière politique ou dans les affaires… Notamment à la présidence des Etats-Unis, tel Grant.

Carabine Sharps mle 1863. Nous sommes loin de la Winchester. Photo provenant de poudrenoire.free.fr

Un 7e de cavalerie moins caricatural qu’on pourrait le penser. 

Par ailleurs, le film montre bien que Custer a réussi à faire de son régiment, le 7e de cavalerie, une unité soudée, cas assez unique des soldats stationnés dans l’ouest. En effet, la réduction drastique des crédits militaires après la guerre de Sécession a coïncidé avec une contraction spectaculaire des effectifs et une dégradation des conditions de vie des soldats. Les chiffres sur l’alcoolisme, la désertion, le peu de motivation des unités servant dans le Far West sont éloquents (voir notamment les pages 100-102 du livre de Jacquin et Royot à ce sujet) et on voit à l’écran le changement opéré par Custer. Il rend une atmosphère militaire au fort et une cohésion à ses hommes,  fait adopter, de façon très hollywoodienne, le fameux air Garry Owen qui vient d’Irlande (en fait déjà bien connu aux Etats-Unis, mais un film doit faire rêver pour vendre!) etc.

L’adoption de Garry Owen vue par le film. Contrairement à l’anecdote, les phrases dites par Custer sur le fait qu’un régiment a besoin d’un signe d’unité, et continue à vivre même si ses hommes meurent n’ont rien de caricaturales, elles:

Enfin, deux derniers passages à retenir : Custer se moque des Winchesters vendues aux Indiens en affirmant que ce n’est pas une arme pour les soldats. Or, si elle fait les choux gras du western, ce n’est effectivement pas le matériel réglementaire de la cavalerie américaine, qui utilise les carabines Sharps ou Spencer ou encore des armes de chez Springfield… En effet, la Winchester est d’un calibre assez faible et incite à la consommation de munitions, ce qui ne plaisait pas à l’Etat-major. Je terminerai par cette citation tirée du film, et dite par un des officiers de Custer juste avant sa dernière bataille : « Pour qui vous prenez vous les Yankees [il est d’origine irlandaise] ? Les seuls vrais Américains sont derrière la colline avec des plumes sur la tête. »

Peu importe qu’elle soit sans doute apocryphe, c’est surtout le signe qu’il ne faut pas mettre tout l’Hollywood de l’époque dans le même panier. Néanmoins il nous reste à parler de Custer lui-même et de la manière dont il est présenté.

Bibliographie (non exhaustive) sur le contexte historique: 

-AMEUR (Farid), Sitting Bull, héros de la résistance indienne, Paris, Tallandier, coll. « Texto », 2014, 239 p.

-JACQUIN (Philippe) et ROYOT (Daniel), Go west ! Une histoire de l’ouest américain d’hier à aujourd’hui, Paris, Flammarion, coll. « Champs », 2004, 368 p.

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Custer à l’écran: « They died with their boots on » (1/3).

S’il y a bien une chose dont j’ai trop peu peu parlé jusqu’ici, c’est le cinéma. Pourtant c’est un art que j’affectionne particulièrement et qu’il est très intéressant d’étudier. Voilà pourquoi j’ai décidé de parler aujourd’hui d’un film de 1941 : They died with their boots on, du prolifique Raoul Walsh. On passera sur la calamiteuse traduction française (La charge fantastique) du titre pour se concentrer sur le casting et ce qui est raconté, avant de revenir sur l’intérêt de tout ceci pour l’histoire militaire, évidemment.

Le contexte

Le film montre donc de manière romancée, et assez hagiographique, la vie du fameux George Armstrong Custer. Si le personnage  est connu pour avoir fini sa carrière sous les tirs et les flèches des Indiens à Little Big Horn à la tête de son unité, le célèbre 7e de cavalerie… They died with their boots on commence bien en amont: on le voit arriver à l’académie militaire de West Point, où sont formés les officiers de l’armée américaine. Débarquant chamarré comme un général napoléonien et ne doutant de rien… Il va faire des siennes, accumuler les fautes et engranger des résultats catastrophiques. 

Ainsi, dès le début, le ton est donné: le film est très plaisant à regarder et regorge de moments dont on se souvient. Souvent drôle, il est bien filmé, avec de très belles images et scènes sur lesquelles je reviendrai. D’ailleurs, le fameux général est joué par Errol Flynn, immense vedette de l’époque qui tourne une nouvelle fois avec la sublime Olivia de Havilland, qui joue là son épouse. En effet, c’est l’un des huit films où le couple mythique fut ensemble, dirigé notamment par d’autres maîtres comme Michael Curtiz (Casablanca…). A leurs côtés on notera tout de même le jeune et encore assez peu connu Anthony Quinn, qui campe le chef indien Crazy Horse.

Custer (Errol Flynn) débarque à West Point… Et multiplie les maladresses dignes d’un vaudeville. Là il se prend pour Murat, « the king of cavalrymen ».

Les évènements 

Custer a donc des notes catastrophiques… Mais il est un excellent cavalier et la Guerre de Sécession a besoin d’officiers pour mener les masses d’hommes au combat et George en fait partie, se distinguant à de nombreuses reprises durant ce conflit, de manière moins romanesque que dans le film évidemment. La guerre finie, l’officier s’abîme dans la boisson et s’ennuie, avant d’être rappelé au service actif dans l’ouest, dont la « conquête » est peu à peu faite par les Américains, au détriment des tribus indiennes. Or, il sait mener les hommes et son goût de l’action n’est un secret pour personne.

La suite est connue: malgré ses sympathies pour ces populations et la corruption ambiante, il ne peut empêcher la conquête des Black Hills (c’est du moins ainsi que le film montre les choses, nous y reviendrons dans l’analyse), terres sacrées des Indiens, à cheval entre le Montana et le Dakota, où l’on a trouvé de l’or en 1874… et que les compagnies ferroviaires aimeraient bien traverser. Après l’échec des négociations, la guerre débute donc et son unité est engagée dans les combats. Or, tombé dans une nasse à Little Big Horn, il meurt avec ses hommes le 25 juin 1876, victoire qui ne permet toutefois pas aux Indiens de gagner la guerre. Depuis, le personnage est tantôt adulé tantôt détesté, la vérité étant comme toujours plus nuancée.

Nous verrons donc la prochaine fois les enseignements qu’on peut tirer de ce film par rapport à l’histoire et à l’histoire du cinéma, et il y a beaucoup à dire ! 

L’affiche. Le film est produit par la Warner Bros.

 

Bibliographie sur le contexte historique: 

-AMEUR (Farid), Sitting Bull, héros de la résistance indienne, Paris, Tallandier, coll. « Texto », 2014, 239 p.

-JACQUIN (Philippe) et ROYOT (Daniel), Go west ! Une histoire de l’ouest américain d’hier à aujourd’hui, Paris, Flammarion, coll. « Champs », 2004, 368 p.

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