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La guerre de Grenade ou révolte des Morisques (1568-1570) II sur III.

La révolte éclate…

L’insurrection sur le point de se déclencher va donc se dérouler dans une zone essentiellement accidentée, de 80 km de long sur 30 de large. Les Morisques sont capables d’y vivre dans une forme d’autarcie, notamment grâce à leurs cultures en terrasse. Le tout débouche sur une côte rocheuse peu facile à surveiller et soumise aux infiltrations barbaresques (c’est ainsi que l’on appelle alors l’Afrique du Nord: les côtes de Barbarie).
Tout commence par deux actions simultanées, mais non liées. La première consiste en le massacre de voyageurs suite à leur action de pillage des locaux. La seconde se déroule à Cadiar, où 50 arquebusiers sont massacrés chez l’habitant. La nouvelle de ces troubles parvient à Grenade le 26 décembre, sans que cela ne soulève tout d’abord une grande émotion. Pourtant, un certain Ben Farax a pour projet de soulever la ville, important symbole du pouvoir, notamment du fait de la présence des tombeaux des rois espagnols. Son initiative est un échec, car le quartier morisque ne le suit pas. Malgré tout, les choses s’accélèrent avec la nomination d’un roi des Morisques. Cet homme faisait pourtant partie des notables de Grenade et avait même un nom chrétien, Fernando de Válor y Córdoba. Cette proclamation n’est pas anodine car sa famille se revendique de l’ancienne branche régnante de Grenade, déchue en 1492. Son oncle est nommé capitaine général, sorte de chef de l’armée (mais il n’eut jamais une grande autorité sur les bandes morisques). L’un des grands espoirs de la rébellion qui prend forme est, on l’a vu, de prendre Grenade, espoir qui ne fut jamais atteint. On pense en fait que les Espagnols avaient été plus ou moins avertis de ce qui se tramait, notamment par le biais d’un jésuite. Les Morisques comptent aussi sur l’aide extérieure. Celle-ci exista, mais non sans arrière-pensée de la part des Barbaresques, toujours à l’affût d’une opportunité. On les vit donc profiter de la guerre pour vendre des esclaves, récolter le fruit de pillages d’églises…

Rocroi, 1643, Condé écrase les tercios. C’est la fin d’un monde et de leur domination des champs de bataille. Constitués à la fois de piquiers et de tireurs (de plus en plus nombreux), ils peuvent faire feu et se défendre de la cavalerie. Ils sont indissociables de la puissance espagnole.

Et s’étend:

Les villages de montagne, plutôt peuplés, constituent autant de forteresses. Dans ce genre de guerre, l’avantage va à celui qui connaît et maîtrise le terrain. Si c’est le cas des rebelles, ceux-ci sont peu armés et n’importe quelle place un tant soit peu défendue leur échappe. Le contrôle des ponts, cols et routes n’est pas non plus à négliger. La rébellion s’étend et gagne l’ouest de la région. Toutefois, dès 1569, des tercios (l’excellent infanterie espagnole, détrônée par le Grand Condé à Rocroi) arrivent sur place, depuis Naples où ils ont été levés. La révolte a alors atteint son maximum, elle va de Malaga à Huescar. L’arrivée des troupes régulières espagnoles fait que les combats dégénèrent en une vraie guerre. Les bandes morisques peuvent atteindre plusieurs milliers d’hommes voire se regrouper, pour former des ensembles allant jusqu’à une demi-douzaine de milliers d’hommes. Toutefois ces rassemblements sont souvent limités, car les chefs ne sont pas unis. Si la population est impliquée, le nombre de combattants demeure limité,  même si jusqu’à 4000 hommes ont pu venir de l’extérieur. En fait, il n’y eut pas de débarquement ottoman en force. Constantinople ne vit pas la chose au-delà d’une diversion dans sa stratégie générale.
Très vite, la guerre prend un caractère inexpiable des deux côtés : dès juin 1569 des populations chrétiennes sont mises à mort, avec des raffinements de cruauté, lors de parodies sanglantes de baptêmes. A cette violence, répond une violence des Espagnols qui pillent et violent. L’effondrement de l’autorité royale morisque donne le signal que tout est permis. Bientôt, tout appel au pardon, à la raison, reste sans écho et ce d’autant plus que l’implication de la population morisque apparaît comme de plus en plus évidente au fil du temps. Une de leur grande faiblesse reste leur division, malgré la présence d’un roi. Bien vite, les chefs se montent les uns contre les autres, se jalousent. De plus, beaucoup sont incompétents en matière militaire. Ainsi, le fameux roi des Morisques est retrouvé étranglé en octobre 1569. Il se serait déclaré chrétien peu avant sa mort  (et ce n’est pas totalement exclu), ce qui lui aurait valu son sort. Le chef des Espagnols, Don Juan d’Autriche, le fait d’ailleurs inhumer dans un cimetière chrétien. Si son fils lui succède, il finit de la même manière que lui…

Source: conférence donnée sur la question par le professeur Olivier Chaline.

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