Les Gaulois et la guerre: II) Qui fait la guerre ?

Tout le monde ne fait pas la guerre chez les Gaulois. Elle est tout d’abord une affaire d’hommes libres: ces sociétés, comme les autres du bassin méditerranéen antique, pratiquent en effet l’esclavage et les personnes réduites à la servitude ne combattent pas. De plus, tous ceux qui sont libres n’ont pas de fonctions guerrières. Comme beaucoup de peuples indo-européens, les Gaulois libres se répartissent en trois classes: ceux qui ont des fonctions sacrées, ceux qui se battent et ceux qui produisent. Si ce schéma n’est sans doute plus aussi figé à la fin de l’indépendance gauloise qu’aux siècles précédents (les activités des individus peuvent déborder du cadre, en plein mouvement d’ailleurs), il reste structurant pour comprendre leur fonctionnement. Il va d’ailleurs se retrouver sous une forme assez similaire après l’Antiquité, avec la formation des trois ordres de la société française (clergé, noblesse et tiers-état).

Qui sont les guerriers ?

Les combattants sont donc des libres dont c’est la fonction précise, transmise de manière héréditaire. On les appelle « guerriers » et les Romains, les ramenant à ce qu’il connaissent, les nomment « chevaliers » (equites). Ils ne recouvrent toutefois pas la même réalité que les chevaliers romains, ordre hiérarchiquement inférieur aux sénateurs et somme toute différent. Néanmoins, nous savons que ce sont des gens assez riches car ils doivent payer leurs armes et leur équipement, de plus en plus cher. En effet, à partir du IIIe siècle avant notre ère, ces combattants utilisent de plus en plus le cheval, animal de grand prix et dont le harnachement augmente aussi les frais engagés.

Toutefois, ces guerriers ont la possibilité d’accroître leurs biens par le pillage et le butin récolté dans les guerres et ils participent à l’extension du territoire contrôlé par leur peuple. De plus, leur position sociale est enviée car ils ont un rôle politique majeur, notamment dans les prises de décision. Ils entretiennent de vastes réseaux de clientèle assurant leur position et qui sont financés par les richesses engrangées lors des guerres. Bien entendu, leur activité comporte le risque d’être blessé ou tué, ainsi que la contrainte d’être envoyé au combat à tout moment.

Sont-ils alors comparables à des soldats de métier d’aujourd’hui ? Pas vraiment. Il n’y a pas de vraie armée en Gaule, de troupes permanentes avec casernes, unités constituées et règlements. Les guerriers le sont car ils ont hérité de ce statut, il ne l’ont pas choisi. C’est une tradition, comme une exigence auxquelles on ne peut se dérober, car elles ont des implications civiques mais aussi religieuses.

Servants et mercenaires

Cela ne veut pas non plus dire que les guerriers font tout et n’ont aucune liberté. Ils sont entourés d’une foule de serviteurs et autres servants d’armes qui gèrent l’intendance, l’entretien et l’emport de l’équipement. Il n’est pas fourni par l’État et les guerriers doivent s’en charger eux-mêmes, assistés de ces personnes souvent issues de leur clientèle. Le mot est à comprendre dans son sens antique: des pauvres (clients) nourris et protégés par un guerrier (le patron) auquel ils doivent un service. Il arrive d’ailleurs que ces clients soient engagés au combat en cas de besoin, preuve que la guerre n’est pas uniquement l’affaire des chevaliers.

De plus, les guerriers-chevaliers ont une certaine liberté dans leurs activités. Quand leur peuple ne les requière pas et qu’il n’est pas en guerre, ils peuvent agir pour leur propre compte et vendre leurs services. Les Gaulois sont en effet des mercenaires connus et réputés dans le monde antique. On les retrouve dans l’Egypte des Ptolémées, chez les Étrusques, en Sicile, en Macédoine et même au service d’autres peuples gaulois. Evidemment, les distances à parcourir peuvent les amener bien loin de leurs régions d’origine, et les contrats malhonnêtes à se révolter contre leur employeur pour se payer eux-mêmes. Ils ne sont pas l’équivalent des Suisses de la monarchie française du XVIIIe siècle.

Bibliographie consultée (sans but d’exhaustivité):

La recherche sur les Gaulois a beaucoup progressé ces dernières décennies grâce à des historiens comme Christian Goudineau et Jean-Louis Brunaux. J’ai utilisé sa dernière synthèse la plus à jour, d’un accès facile, bien écrite et fort intéressante:

-BRUNAUX Jean-Louis, Les Gaulois, Paris, Tallandier, coll. « Texto », 2020, 476 p.

Ma recension du livre

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